En 1789, 150 000 ouvriers et artisans implorent le tiers-État dont ils sont exclus, trop miséreux, de quand même les représenter.

mars 8, 2019 0 Par Mathias Weidenberg

Les députés aux États Généraux devaient avoir une fortune minimum, 6 livres de revenu fiscal, l’équivalent aujourd’hui dun revenu déclaré de 40 000 euros annuels, et un logement fixe, à une époque d’extrême précarité des emplois et des logements.

Ces deux attributs excluaient du droit de vote et de représentation 80% des français du Tiers État.

En avril 1789, une émeute à deux pas de la Bastille, révolte d’ouvriers après que leur patron ait annoncé vouloir réduire leurs salaires, réduction rendue nécessaire pour rester « compétitif » après l’ouverture du marché français par le traité de libre échange de 1786 avec l’Angleterre, et devant être compensée par une réduction des impôts sur le blé entrant dans la capitale censée être répercutée dans les prix du pain par les fermiers généraux, les meuniers, les boulangers, était réprimée dans le sang.

La violence de la répression inspira d’ailleurs a un député bourgeois du tiers état de ne plus vouloir parler de « populace », mais de « peuple », regrettant le spectacle de trois régiments estropiant la foule en colère.

Les mêmes ouvriers d’avril 1789 fourniront les bataillons du peuple bloquant les barrières d’octroi entre le 12 et le 14 juillet 1789, avant de prendre la Bastille elle-même.

Sentant le mauvais coup, c’est à dire des États Généraux réformant la fiscalité royale sans se soucier des soucis des moins pauvres, 150 000 ouvriers et artisans signèrent donc ce texte en image, que j’ai trouvé dans la biographie du député Defourny, précurseur de la démocratie sociale, défenseur tout au long de la Révolution d’un suffrage universel masculin sans condition de ressource ou de logement fixe, et l’un des premiers penseurs d’un système de sécurité sociale, des l’Ancien Régime.

Aujourd’hui, écoutant les revendications des Gilets Jaunes se méfiant d’une représentation politique vidée d’ouvriers et d’artisans, voulant y répondre par un Referendum d’initiative citoyenne, parlant d’augmentation des salaires, de solidarité, et voyant leur répression, immédiatement, sans jamais, jamais, ouvrir la moindre voie de dialogue, je me dis que les questions essentielles posées à la chose publique, à la politique, ne changent jamais. Ce sont seulement les contextes et les noms des personnes qui évoluent avec le temps.